Dans le numéro de Knack du 12 octobre 2011[1], un article a été publié au sujet de la dompéridone (Motilium® et autres noms de spécialité), dans lequel le pharmacologue belge Luc Hondeghem tire la sonnette d’alarme sur la prise de dompéridone qui pourrait être associée à un risque de mort subite. La presse fait largement écho de cet article.
Que sait-on au sujet de la dompéridone et du risque de mort subite?
– Dans l’article “Prise en charge du reflux gastrooesphagien chez les jeunes enfants” [voir les Folia d’août 2011: https://www.cbip.be/Folia/2011/F38F08B.cfm], on concluait qu’une « relation entre la dompéridone et l’allongement de l’intervalle QT chez les jeunes enfants est suspectée », mais que « ceci est peu documenté, en particulier en ce qui concerne le risque éventuel de torsades de pointes ».
– Lors de l’administration intraveineuse de doses élevées de dompéridone, en prévention des vomissements liés à la chimiothérapie chez les adultes, de rares cas d’arythmies ventriculaires et de mort subite ont été rapportés; en raison de ces rapports, les formes parentérales de la dompéridone ont été retirées du marché voici plusieurs années déjà.
– Concernant l’administration orale de dompéridone, l’hypothèse d’un risque de mort subite est principalement basée sur les résultats d’une étude cas-témoins néerlandaise (l’âge moyen des patients était de 72 ans) : on y constatait que le risque de mort subite était triplé voire quadruplé, surtout en cas de doses supérieures à 30 mg par jour. C’est en extrapolant des données de cette étude que l’article de Knack fait une estimation de l’incidence de la mort subite liée à la dompéridone en Belgique. Les études cas-témoins permettent de signaler des effets indésirables, mais elles ne possèdent pas le niveau de preuve des études randomisées contrôlées. Quelques cas de torsades de pointes avec la dompéridone ont également été rapportés au Canada, mais le lien de causalité était difficile à évaluer.
Que doit-on en retenir ?
Chez la plupart des patients, la dompéridone est utilisée de manière symptomatique, pour soulager des symptômes anodins. Dans de tels cas, même une augmentation minime d’un risque grave influence fortement la décision d’utiliser un médicament. Dans l’attente de données complémentaires, la prudence semble de mise lors de l’utilisation de dompéridone, a fortiori chez les patients présentant d’autres facteurs de risque de torsades de pointes (voir page 6 du Répertoire Commenté des Médicaments: https://www.cbip.be/GGR/MPG/IntroF_5.cfm).
[1]Le Vif/L’Express en fait également état sur son site Web (rubrique « Sciences et santé », communiqué du 11/10/2011).